9 - 15 juin
Exposition "O tempora, o mores !"
Organisé par : Blandine Insler
A travers la peinture et la photographie, Blandine Insler questionne l’échelle de valeurs de nos sociétés occidentales. Vernissage Mardi 10 Juin, 17h>20h, entrée libre.
Exposition O tempora, o mores !
Note : La phrase latine "O tempora, o mores !" signifie « Ô temps, ô mœurs ! ». Elle est attribuée à l'orateur romain Cicéron, qui l'emploie dans son discours "Pro Caelio" pour exprimer sa désapprobation face aux changements sociaux et moraux de son époque.
Le quotidien, avec son ensemble de normes sociales, nous plonge dans des automatismes. Nous oublions à quel point la plupart de nos tracas sont insignifiants. Nous perdons de vue la fragilité de nos existences. Nous éludons la petitesse de notre planète Terre, grain de sable dans l’univers.
A travers la peinture, la vidéo et la photographie, je cherche à questionner l’échelle de valeurs de nos sociétés occidentales. J’ai choisi de le faire sous l’angle de notre rapport au temps et, en creux, de notre rapport à l’impermanence de nos vies. Nous accorder un moment de répit pour faire émerger une mélancolie existentielle, se mettre pour quelques instants en retrait du monde, et en tirer un élan de vie nouveau.
Mon travail s’articule selon 4 axes.
Ins[temps]tané
Les œuvres Ins[temps]tané cherchent à capter la trace intime du geste humain et, à travers elle, la mémoire d’un infime instant de vie. Développée au fil des ans, mon approche suppose un temps méditatif préalable, pendant lequel la lenteur apaise les pensées envahissantes et m’aide à me concentrer sur le corps. La musique - et les vibrations qu’elle dégage - favorise cette préparation.
Après plusieurs heures, vient le temps du geste, souvent unique, qui signera la toile. Les yeux fermés, les pieds bien ancrés dans le sol, en respiration profonde, enveloppée par le morceau de musique qui restera associé à l’œuvre, la sensation des courants d’énergie se fait de plus en plus marquée, jusqu’à emporter le mouvement, dans une fulgurance. Aboutissement du processus, sa trace ancrera la mémoire de cet instant.
Viscéral, libéré de tout contrôle mental, j’ai la conviction que ce geste imparfait, spontané et sans repentir, porte en lui une forme de vérité crue, un idéal de l’action juste, qui ne se laisse pas troubler par le qu’en dira-t-on.
Je filme et diffuse les vidéos de ces touches finales. Elles provoquent des vagues de révolte et de haine, que j’interprète comme le signe d’une culture occidentale conventionnelle, où la valeur repose sur le temps passé, le labeur visible, la complexité technique, le contrôle, la perfection. A moins que ces mépris ne soient le fruit de la peur ou de la jalousie devant une liberté jugée trop grande, dérangeante, dans une société bien moins libre qu’elle ne prétend l’être ? Les toiles Ins[temps]tané sont une invitation à se détacher de ces jugements.
Elles plaident pour la connaissance, l’acceptation et l’expression de notre vrai soi, qui supposent un travail de libération invisible et difficile, mais ô combien essentiel pour nourrir une relation harmonieuse à soi et au monde.
Subs[temps]ce
Ce processus de création Ins[temps]tané est exigeant et entraine de nombreux échecs. Il arrive que je ne parvienne pas à atteindre l’état de détachement nécessaire, que le geste ne soit pas libre, et que sa trace ne résonne pas. Je retire alors la peinture de la toile, pour recommencer.
Pendant longtemps, j’ai jeté, honteuse, cette pâte informe dont les méandres de couleurs me fascinent. C’est d’abord dans ce souci de sobriété écologique que sont nées les toiles Matière Brute, devenues maintenant la série Subs[temps]ce.
Plaisir régressif et transgressif de ce que la peinture a de plus matériel – une matière colorée apposée sur un support – ces toiles donnent une nouvelle vie à la matière échouée. Les formats sont petits, les reliefs accentués. Les œuvres sont encadrées de châssis retournés qui montrent le bois et la toile, dans une volonté de mettre en valeur la matière.
Elles symbolisent l’idée que, derrière un échec ou un coup dur, se cache souvent une opportunité créatrice, qu’il nous revient de déceler.
J’aime aussi y voir une allégorie du précepte découvert par Lavoisier : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme », évoquant non plus l’instant intime du geste humain, mais la substance universelle de la matière.
Cette série nous rappelle que les atomes qui nous constituent proviennent en réalité d’un même ensemble, qui nous relie les uns aux autres, au vivant et aux choses.
In[temps]périe
Quand la série Subs[temps]ce évoque les cycles naturels de la matière, In[temps]périe prolonge la réflexion en laissant la nature elle-même intervenir sur l’œuvre.
Depuis novembre 2024, j’expose une œuvre aux intempéries et j’en photographie et filme l’évolution chaque semaine.
J’aime observer le déclin de la toile, les craquelures de la peinture, les perles de rosée, les brindilles, les feuilles mortes qui se sont collées dessus.
Ce travail est une remise en question de nos standards de performance et de perfection. Il valorise l’esthétique de l’incontrôlé, la poésie de l’imprévu, le charme de l’irrégulier. Il célèbre la chance et la beauté de vieillir. Par extension, il symbolise l’acceptation sereine de ce qui advient hors de notre champ d’influence.
Con[temps]plation
Après l’instant fulgurant du geste, le cycle perpétuel de la matière et l’imprévu de la nature, Con[temps]plation aborde la temporalité vertigineuse du cosmos.
En 2015, les scientifiques ont capté des ondes de choc spatiales. Elles résultaient d’une percussion entre deux trous noirs, qui remonte à 1,5 milliards d’années ! L’humanité a découvert comment allumer un feu il y a environ 450 000 ans, l’invention de l’écriture date d’il y a environ 5000 ans, l’apparition du système solaire est, elle, estimée à 4,5 milliards d’années.
En contemplant le ciel étoilé, je ne peux m’empêcher de me rappeler que l’étoile que nous croyons apercevoir n’est en réalité que la lumière qu’elle a émise il y a plusieurs années. Peut-être que l’étoile n’existe même plus au moment où sa lueur parvient enfin à nos yeux.
De telles vérités me fascinent.
Pour évoquer modestement ce temps et ces mouvements cosmiques, hors de toute proportion, la série Con[temps]plation présente des toiles monochromes éthérées, inspirées de mes longues observations célestes et patiemment travaillées selon la technique traditionnelle du glacis en peinture à l’huile. Elles sont une invitation à prendre le temps de lever les yeux vers la voûte céleste, s’émerveiller humblement de notre existence, infiniment petite dans l’infiniment grand, et savourer les bonheurs simples, loin du tumulte du monde.
Ingénieur diplômée en génie physique, j’ai évolué pendant plus de vingt ans dans l’univers de l’entreprise, comme manager de projets puis manager d’équipes. Addict au travail et à l’action, il a fallu une série de lourdes épreuves de santé pour m’arracher brutalement à cette vie trop intense et réaliser à quel point le poids de la société m’avait éloignée de mes besoins profonds. Ce que d’autres perçoivent comme une chute, je l’ai vécu comme une libération.
A travers ce projet, je souhaite proposer un pas de côté par rapport aux définitions traditionnelles d’une vie réussie dans les sociétés occidentales, en particulier pour ceux d’entre nous qui se sentent parvenus aux limites du modèle.
Je me réjouirai si ces travaux et ces quelques pistes de réflexion, inspirées des sagesses antiques, vous apportent un moment de pause et de félicité.
Blandine Insler
Horaires
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juin 2025
- lundi 09 14h30 - 19h00
- mardi 10 11h00 - 20h30
- mercredi 11 11h00 - 19h00
- jeudi 12 11h00 - 19h00
- vendredi 13 11h00 - 19h00
- samedi 14 11h00 - 19h00
- dimanche 15 11h00 - 19h00
Durée
Du 9 au 15 juin 2025